Thierry Marx : "12 semaines sont suffisantes pour apprendre les bases de la cuisine"

19 mai 2016

TOP CHEF - SAISON 4 / LE JURY

Le chef Thierry Marx échange avec 4 jeunes entrepreneurs et un collégien sur la formation professionnelle, l’avenir de la restauration, l’évolution du secteur… Le chef a des idées, il s’explique sur le quotidien Le Parisien

Thierry Marx : « Les parents sont obnubilés par le bac général ! »

Le célèbre chef étoilé parisien a accepté de répondre aux questions de quatre entrepreneurs et d’un collégien qui rêve de se lancer dans le monde de la cuisine. Bien manger, formation, management, business… Thierry Marx aborde avec eux tous les sujets cruciaux auxquels sont ou seront confrontés ces (futurs) professionnels de la restauration.

Léa Woittequand : La restauration est un milieu réputé difficile. Comment intéresser davantage les jeunes au métier ?

Les jeunes s’intéressent déjà au métier, mais la durée de l’apprentissage les décourage, car elle reste trop longue.

D’autant qu’à la fin de leur CAP, ils ne toucheront que 1 200 € net… On ne peut plus leur donner l’ambition d’être des travailleurs pauvres. Il faut raccourcir la formation pour qu’ils accèdent plus vite à la qualification professionnelle. 12 semaines sont suffisantes pour apprendre les bases de la cuisine : la maîtrise de la découpe, les quatre grands types de cuissons… L’important est de permettre aux jeunes d’entrer rapidement dans la vie active pour qu’ils bénéficient d’un salaire et s’élèvent de leur niveau social. Les temps changent. Moi, je fais évoluer mes employés en six mois. Quand j’ai débuté, cela prenait deux ans…

Pierre Levy : L’apprentissage est-il vraiment adapté à ce métier ?

Il y a des choses à revoir, au niveau des horaires notamment. Un apprenti de moins de 18 ans ne peut toujours pas commencer sa journée avant 7 heures. Il faudrait décloisonner tout cela, alors qu’aujourd’hui, la législation a plutôt tendance à se rigidifier ! Bien sûr, nous devons veiller à ne pas tomber dans l’exploitation des jeunes salariés. Ces derniers doivent rester en capacité de dire oui ou non.

Nabil Admi : Je suis en 3e et j’aimerais faire un bac pro cuisine. Mais la filière professionnelle inquiète les parents…

Les parents sont obnubilés par le bac général ! Il faut que le monde de l’entreprise et l’Education nationale travaillent ensemble dès le collège. L’accès à la formation professionnelle doit se faire le plus tôt possible, que ce soit dans les métiers en devenir comme ceux du déménagement, du bâtiment, des services ou de la mécanique… Toutes ces professions ont la réputation d’être difficiles, mais offrent de nombreuses opportunités d’évolutions. Les jeunes ne doivent pas hésiter à se renseigner sur ces métiers et à en parler à leurs parents. Moi, je ne voyais plus ce que pouvait m’apporter l’école au collège, alors j’ai eu la chance d’entrer en formation professionnelle et d’apprendre le métier de pâtissier. Cela a été une expérience incroyable, une ouverture sur le monde.

Nabil Admi : Trouve-t-on du travail avec un bac pro ?

Quand on a un projet, personne ne peut nous arrêter ! Dès lors qu’on est passionné, qu’on est prêt à se lever à 6 heures du matin pour faire des gâteaux, car on aime cuisiner, il y a du boulot ! C’est pour ça que je me bats pour la formation professionnelle d’excellence, notamment dans les quartiers défavorisés comme celui-ci (NDLR : un quartier populaire de l’Est parisien). Elle permet d’avoir un emploi, mais aussi de changer d’employeur lorsqu’on en a envie. Je veux former des hommes et des femmes libres. L’important est que chacun puisse avoir des projets, de l’ambition. C’est bien plus fort qu’un diplôme. Quand un jeune a des projets, la planète est son terrain de jeu. En revanche, que c’est triste une jeunesse sans projet.

Source LeParisien