Et si la haute cuisine devenait exclusivement évènementielle ?

29 janvier 2015

Opéra de New York, 20h30. Quarante-cinq minutes qu’ils attendent. En silence. Ce moment, ils l’ont espéré depuis des mois. Certains ont même fait le déplacement depuis le Mexique alors peu importe l’attente. Comme c’est le cas lors d’un tel évènement, les happy few présents ont réservé leur billet dès janvier de l’année passée. « Ma femme adore son univers mais n’a pas pu assister à sa tournée asiatique l’an dernier » indique Peter Nichelson, l’un des heureux et (riches) spectateurs. Tokyo, Séoul, Shanghai… : la mégastar de ce soir joue de toute façon à guichet fermé quelle que soit la date. Soudain, il arrive, vivement applaudi par un parterre de privilégiés déjà conquis et prêts à découvrir sa nouvelle partition. Lui ? Alain Passard, cuisinier breton, chef de l’Arpège.

Noma-Japon-Pourcel

La scène décrite est fictive mais pourrait rapidement devenir réalité. Ce n’est pas un secret : ces dernières années, les chefs sont devenus des personnalités publiques au même titre que les sportifs, musiciens et comédiens. Dans un avenir pas si lointain, certaines étoiles de la gastronomie pourraient succomber à l’envie de quitter leurs étroites et bruyantes cuisines néonisées et leurs 15 heures quotidiennes à trimer pour un avenir plus radieux, tant pour leur portefeuille que pour leur santé. Si des cuisiniers tels qu’Alain Ducasse ou Yannick Alléno ont choisi la voie de l’ubiquité, multipliant les adresses au rythme des opportunités, d’autres, friands de se frotter à un « restaurant mondial », pourraient ainsi dans le futur faire fi de leurs adresses géolocalisées pour se concentrer sur la démonstration de leur art à travers le monde à destination d’une clientèle triée sur le volet, à l’instar des grands solistes et autres stars de l’art lyrique. Ces derniers (Jonas Kaufmann, Anna Netrebko, Juan Diego Florez, Angela Gheorghiu, Nina Stemme…) exportent leur talent sur les scènes des plus fameux opéras existants, de Vienne à New York. Un modèle avantageux à plusieurs titres : réduction des contraintes du restaurant « traditionnel », possibilité de se consacrer à la recherche et à la création de mets nouveaux (fini l’ennui et la répétition qu’impose parfois la restauration), occasion de s’affranchir du système contraignants des castes Michelin et autres classements, internationalisation de l’image et de la notoriété, communication optimisée car liée à une programmation et donc à des actualités. Et si la haute cuisine devenait exclusivement évènementielle ?

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Source Atabula.com