Street food japonaise : les takoyaki

2 novembre 2013

Source : LeManger.fr


Stand de takoyaki, centre ville d’Osaka © Camille Oger

En attendant de lire le gros dossier sur la street food japonaise que j’ai réalisé pour le magazine Wasabi (ce sera publié dans le numéro d’hiver), parlons un peu des takoyaki. Ces petites boules de pâte fondante fourrées au poulpe sont un must dans tout le Japon, et plus particulièrement à Ōsaka. C’est joli, c’est bon, c’est chaud, c’est salé et c’est sucré, bref, le snack idéal. Suivez-moi, vous saurez tout sur le takoyaki, icône de la street food japonaise.

Le takoyaki / たこ焼き est une star à Ōsaka, la deuxième ville la plus peuplée du Japon. Pour comprendre le contexte, quelques mots sur Ōsaka : on dit souvent que c’est LA ville du manger au Japon. Toutefois ce n’est pas la ville de la grande cuisine. À l’époque d’Edo on la surnommait « la cuisine du Japon », en japonais 天下の台所 / tenka no daidokoro, mais cela ne veut pas dire qu’on y cuisinait mieux qu’ailleurs.


Stand de takoyaki © Camille Oger

En fait, sa position centrale a très tôt fait d’elle un pôle majeur du commerce au Japon, et plus particulièrement du commerce alimentaire. La consécration est venue quand le Dōjima Rice Exchange (堂島米市場 / Dōjima kome ichiba) s’y est installé, en 1697. Comme le riz était l’ingrédient le plus crucial de l’alimentation japonaise à cette époque, bim, Ōsaka est devenue la cuisine du Japon – ou du moins son stock de riz.


Stand de takoyaki, Osaka © Camille Oger

On dit aussi qu’Ōsaka est la ville où l’on se ruine en nourriture 大阪の食い倒れ / Ōsaka no Kuidaore, par opposition à Kyōto où on l’on se ruine en vêtements 京の着倒れ / Kyō no Kidaore. Cela ne veut pas dire que la nourriture coûte cher à Ōsaka.

Ōsaka, haut-lieu de la street food au Japon

En réalité, elle est même assez bon marché, mais abondante et très visible, ce qui multiplie les occasions d’en acheter. Pour des gens ordinaires qui ne gagnent pas des fortunes, cela peut donc effectivement tourner à la ruine, enfin, c’est une hyperbole, je ne suis pas certaine que cela arrive réellement.

Bref, pour penser qu’Ōsaka est la ville où l’on mange le mieux au Japon, il faut soit être de là-bas, soit n’avoir jamais mis les pieds à Kanazawa, Shizuoka, Hokkaido et dans les mille autres coins de l’archipel où la nourriture est exceptionnelle – c’est à mon avis le cas des critiques gastronomiques français et américains qui se sont aventurés sur ce terrain glissant. Ce qui est certain, c’est qu’Ōsaka est depuis longtemps l’un des hauts lieux nippons de la street food.

Cité commerçante et industrielle, elle fourmille de gens qui y vivent ou qui y passent, les voies commerciales maritimes et terrestres ayant très tôt fait d’elle une ville extrêmement attractive pour les marchands en tous genres. Et quand on a des gens de passage, on a de la street food. C’est le meilleur moyen de restaurer à bas prix tous ceux qui n’ont pas de cuisine à disposition. C’est ainsi qu’Ōsaka est rapidement devenue l’un des meilleurs endroits au Japon pour manger dans la rue. Et l’une des spécialités locales, c’est, j’y viens, le takoyaki.


Street food, centre ville d’Osaka © Camille Oger

Tomekichi Endo, un vendeur de street food d’Ōsaka, est crédité comme son inventeur ; il aurait sorti ça de son chapeau en 1935, pouf, sauf qu’en fait, ce type est un gros copieur. Son takoyaki est sérieusement inspiré de l’akashiyaki / 明石焼き, une spécialité créée à Akashi dans la préfecture de Hyōgo – voisine directe d’Ōsaka – dans les années 1850 par Seitarō Mukai, lui aussi vendeur de street food. L’akashiyaki est beaucoup moins connu que le takoyaki, et pourtant ils sont très similaires.

L’akashiyaki, ancêtre du takoyaki

La particularité de l’akashiyaki, c’est sa forme sphérique. Pour le confectionner, il faut disposer d’un moule spécial, enfin, de grandes plaques moulées de demi-sphères. Et c’est sur ce moule que Tomekichi Endo a fait ses premiers takoyaki, qui sont conçus sur l’exact même modèle. En gros, l’akashiyaki est une boule de pâte fourrée au poulpe. Et le takoyaki est une boule de pâte fourrée au poulpe. Forcément, ça sonne comme un plagiat.


Takoyaki dans leur moule © Camille Oger

Mais Endo n’est pas totalement un imposteur, il faut quand même lui reconnaître une certaine originalité. Oui, il a piqué le moule, la forme, les ingrédients de base et le concept, mais il a apporté sa touche qui a fait toute la différence. Pour commencer, il a changé la recette de la pâte.

L’akashiyaki est surtout à base d’oeuf, c’est en quelque sorte une simple omelette à la japonaise, et c’est d’ailleurs ainsi que les habitants d’Akashi l’appellent (en japonais tamagoyaki / 卵焼き). Le takoyaki contient des oeufs aussi, mais moins ; sa pâte est principalement à base de farine de blé, ce qui change totalement la texture et les arômes du plat final.

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