E-réputation des chefs : attention danger !

9 décembre 2015

Un commentaire ou deux, il n’en faut pas plus pour qu’une e-réputation en prenne un coup. Récemment, un particulier a été condamné pour un commentaire négatif écrit avant même que le restaurant attaqué n’ouvre. Certes, le cas est extrême, mais le mouvement de la judiciarisation des commentaires semble être lancé. Pour les chefs, l’ère du soupçon et du doute par rapport aux sites de commentaires est déjà bien avancée. Comment réagir ? Quelles solutions ? Début de réponses.

e-reputation-chef-1067x633

« Restaurant très surfait, tout en apparat, très peu de choses dans l’assiette, l’assiette la mieux garnie est celle de l’addition ». L’addition, la vraie, a été celle délivrée par le tribunal : 2500 euros d’amende et 5000 euros de frais pour la mise en ligne de ce commentaire sur un établissement qui n’avais pas encore ouvert le jour où ces mots cinglants ont été publiés sur Internet. Derrière ce cas d’espèce en tout point ridicule, se cache une attitude symptomatique de notre époque : publier un commentaire, éloigné de toute vérité, mais dont l’objectif est de nuire à la réputation d’un professionnel de l’hôtellerie ou de la restauration. La chose est si facile…

Sauf que, doucement, la résistance s’organise. « On entre dans une ère de notation qui va être surveillée » avance Rémi Ohayon, fondateur du groupe de communication API & YOU*. Et l’actualité lui donne raison. En 2014, le site Tripadvisor a été condamné en Italie par l’Autorité nationale de la concurrence – amende de 500 000 euros -, Amazon a fait condamner des utilisateurs du site pour faux commentaires et Allociné est soupçonné de fausser les notations sur les critiques de film. De son côté, le service national des enquêtes de la DGCCRF, avec ses faibles moyens, s’attaque également au problème. Elle a ainsi fait condamner il y a peu un prestataire français spécialisé dans les « avis » à 7000 euros d’amende – et 3000 euros pour le gérant – pour publication de faux avis de consommateurs, les commentaires étant publiés par une société domiciliée… à Madagascar.

« En affichant leur certificat d’excellence Tripadvisor, les chefs adoubent un système qui repose sur un pourcentage très élevé de faux commentaires. De facto, ils cautionnent un système qui peut se retourner contre eux à tout moment. »
Alors faut-il vraiment croire ces commentaires laissés pour tout et rien, pour noter le moindre objet de consommation mais également pour noter la tête de son voisin** ? Alors même que, selon la DGCCRF, le taux d’anomalie des avis atteint l’incroyable chiffre de 45%, soit quasiment un sur deux, les Français leur font une confiance quasiment aveugle. Une enquête Nielsen, réalisée en 2013, assure que 80% des acheteurs en ligne tiennent compte des avis. Un paradoxe qui fait mal pour ceux qui sont en première ligne de ce fumeux mensonge : les professionnels de l’hôtellerie et de la restauration. Lesquels se sentent désemparés par la situation. Pour Rémi Ohayon, « cette folie de la notation est un danger. Les professionnels de l’hôtellerie sont déjà tenus en laisse par quelques acteurs comme Booking ; ceux de la restauration le sont de plus en plus par des acteurs comme Tripadivor. Or Tripadvisor a racheté le site La Fourchette. Attention danger : le site d’avis rachète le circuit de distribution. Ce tout-en-un est dangereux pour la profession. » Et d’ajouter que les chefs, sans s’en rendre compte, jouent un jeu dangereux : « En affichant leur certificat d’excellence Tripadvisor, ils adoubent un système qui repose sur un pourcentage très élevé de faux commentaires. De facto, ils cautionnent un système qui peut se retourner contre eux à tout moment. »

« Les marques fortes comme Michelin ou Gault & Millau doivent réagir. Elles doivent créer des communautés de clients certifiés qui peuvent poster des commentaires en toute sincérité. Ce serait un plus pour les clients, pour les lecteurs et pour les chefs »
Subir ou agir ? Rémi Ohayon résume la situation d’une phrase choc : « Il ne faut pas passer du livre d’or au livre de tort. » Autrement dit, le chef ne doit pas…

Lire la suite de l’article ici.

Source Atabula.com par Franck Pinay-Rabaroust