France, la prohibition en marche, les dégâts ne devraient pas tarder

30 octobre 2006

Une interprofession fait découvrir le vin aux étudiants… en catimini.

« Je vous donne l’info, mais surtout n’en parlez pas »… C’est ce que nous a
indiqué le responsable d’une interprofession viticole française à propos
d’une opération de présentation des vins organisée dans un restaurant
universitaire. Un silence rendu nécessaire par la crainte de l’intervention
d’une association ou de médecins hygiénistes qui pourraient faire annuler
l’opération. Il ne s’agit pourtant pas, bien évidemment, d’une opération
destinée à promouvoir l’excès. Bien au contraire : à l’occasion du repas de
Noël dans un restaurant universitaire, un verre de vin – et un seul- sera
proposé aux étudiants en accompagnement de leur plateau repas.
Cette interprofession avait déjà organisé la même opération en décembre
2004. A l’époque, 3 vignerons de 3 appellations différentes étaient venus
servir 700 verres de vins dans ce restaurant universitaire où 900 plateaux
repas sont servis quotidiennement. Cette année, on nous a fait comprendre
que certains responsables universitaires regardaient cette initiative d’un
mauvais oeil explique-t-on à l’interprofession. On s’est finalement
associés à d’autres produits agricoles de la région pour que cette
opération, sous l’égide de la chambre d’agriculture, mette en avant les
produits du terroir plutôt que le vin.
Bien que l’interprofession propose aux étudiants des documents d’information
sur la modération et sur les limites à ne pas dépasser, il semble donc que
certains responsables universitaires considèrent que l’initiation à la
dégustation et la présentation du vin comme complément au repas soit une
incitation à l’alcoolisme…
Une véritable hypocrisie, bien sûr, si l’on veut bien admettre que les
étudiants, à défaut de boire du vin avec modération au cours des repas,
s’adonnent, en fin de semaine, à des consommations excessives d’alcool : dès
l’âge de 16 ans, avant même de devenir étudiants, 27 % des jeunes garçons
Français confessent avoir été ivres au cours de l’année et 12 % au cours du
dernier mois. Leurs boissons préférées n’étant pas le vin mais la bière (40
%) ou les spiritueux (39 %) (Enquête ESPAD, European School survey Project
on Alcohol and other Drugs, 2003).

Si peu de moyens semblent mis en oeuvre pour réduire la consommation
excessive des jeunes, les politiques de santé publique ont au moins atteint
un premier objectif : diaboliser le vin et culpabiliser les consommateurs
modérés au point que la consommation d’un seul verre au cours du repas
puisse être considérée comme problématique et au point que la filière
viticole elle-même n’ose plus communiquer sur des opérations de dégustation
des vins…

Sur Vitisphère du 26/10/06.

Eric Boschman