En Marche

Il y a des couronnes plus lourdes que d’autres à porter.
L’enfant de la région qui rentre au bercail, déjà celle-là, n’est pas rien. Douce aïeule de légende en plus. Aussi, quand vous avez germé, poussé et grandi auprès de deux des plus grands Chefs de la planète ; avant de vous voir comme un homme, avant de vous voir comme un cuisinier, avant de vous voir comme un jeune qui se lance, on vous veut vous mettre une cape. Et vous exiger phénomène.
Marche-en-Famenne a reçu son Simon. Y venant et revenant pour vivre ce plaisir total ; pour recevoir une cuisine qui ne se trahit pas d’ego mais de générosité, qui ne parle pas de démonstration mais de partage et de goût.

De la cuisine de François-Xavier Simon, outre une nature profonde et une identité forte, on sent une ouverture sur la terre entière ; comme si l’homme avait absorbé tous les terroirs, toutes les épices et tous les parfums du monde. Un sentiment nourri par ces petits détails, ces toutes petites choses qui nous prennent, nous surprennent et nous emmènent sans qu’on s’y attende ; ici une épice délicate, là une acidité bien fichue. Une cuisine, pensée avec brio et exécutée en cœur par une jeune brigade habitée par la passion et entièrement marquée par la personnalité de son chef : bardée de goût, solaire dans son âme, lisible, audacieuse et maîtrisée, où chaque élément vient apporter à l’ensemble. Je trouve ça brillant.

Coup de cœur absolu aujourd’hui pour le départ avec les Croquettes de pieds de cochon, rémoulade de chou lacto-fermenté, furikake pour ouvrir la cène ; la Tartelette sablé au parmesan et curcuma, crémeux au gorgonzola doux, ventrèche de thon rouge grillée puis laquée, barigoule d’artichauts poivrade, olives taggiasche, radis rose, pâte de citron, quartiers de figue pour continuer ; le Cœur de ris de veau cuit meunière, poêlée de girolles et cerises noires, frito de Padrón, jus de veau assaisonné d’une bigarade aux cerises noires, tempura de poitrine de veau braisée, sauce piquante, mayonnaise au poivre noir, œufs de truite pour suivre. Et pour clore, la fine tartelette à la mangue, miel et piment d’Espelette, crémeux Dulcey et sorbet mangue.

Le service emmené par Hanna prend grand soin, toujours souriant, si pas rieur, enthousiaste et solaire. Et de plus en plus vineux en rythme d’un cellier qui ne cesse de s’étoffer.

Il est des hommes et des femmes qui créent des liens entre les produits, les assiettes et les émotions, nos émotions.

Allez ! En Marche !

LD