A la conférence de presse du World’s 50 Best Restaurants 2015

20 mai 2015

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8h51. Sur la petite table face au buffet de chouquettes et autres mini-viennoiseries préparées par le palace-hôte, trônent une trentaine d’accréditations plastifiées. Le Monde, l’AFP, l’Express, Libération, Télérama, les Inrockuptibles, le Parisien… : le gratin des médias est de la partie pour la conférence de presse de l’édition 2015 du classement des 50 meilleures tables de la planète. Même le Canard Enchaîné, solidement affairé aux polémiques actuelles sur la réforme du collège, est attendu. Des journalistes suédois, britanniques et chinois ont eux aussi fait le déplacement. A Paris comme ailleurs, le « 50 Best » attire et intrigue, au grand dam des consignes du carton d’invitation pourtant très claires. « Cet évènement est exclusivement réservé aux médias français ». Tant pis, les gorges chaudes n’ont plus de frontières de nos jours. Et tant pis si l’organisateur souhaite développer des stratégies de communication adaptées à chaque pays, l’appétit médiatique pour l’événement est plus fort que cette consigne aseptisée.

La conférence commence. Politesse et discours ultra formaté sont de rigueur. Un expert de la chose gastronomique précise à son voisin : « Ce sont des anglo-saxons. Ils ont beaucoup répété en amont ». Puis vient très rapidement le temps des questions-réponses. Sur scène, William Drew, éditeur de la revue Restaurant, et Rachel Quigley, directrice associés, ont rodé leurs arguments. Cette dernière précise : « J’étais avocate avant de rejoindre le groupe », précision liminaire à l’objectif incertain : souligner le souci de la règle juridique ? De la maîtrise de l’art de la rhétorique ? Côté salle, les journalistes, dotés d’imposants écouteurs sur les oreilles, traduction oblige, fourbissent leurs batteries de questions. Pendant près de deux heures, l’échange sera courtois et diplomatiquement exemplaire. À questions précises, réponses évasives. Un à un, le parterre de journalistes décroche ses interrogations à un rythme soutenu. Un florilège où il y a à boire et à manger : la marque « 50 Best » sera-t-elle déclinée en 50 meilleurs brunchs ou petits déjeuners du monde ? « On réfléchit à des manifestations satellites, tables rondes…

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La soirée du 50 Best

Le classement possède une influence globale. Il faut la monétiser » souligne le patron du titre aux faux airs de Tony Blair. Monétiser, le mot est lâché. Nouvelle question : pourquoi avoir fait appel au cabinet Deloitte si la direction n’a rien à se reprocher ? « Nous prenons de l’ampleur, sous le regard de toute l’industrie. Deloitte vérifie que les votants n’ont pas d’intérêts financiers dans les établissements qu’ils mettent à l’honneur. Ils ajustent, vérifient et approuvent le panel pour éviter tout conflit d’intérêt. N’ayons pas peur de dire que la liste est subjective, que le système de vote n’est pas infaillible ». Quelques journalistes sourient. Un deuxième mot fait mouche : la subjectivité du classement. Qui l’eût cru… Le ballet des questions continuent : quel regard porte le classement sur la politique anti-50 Best du ministère des Affaires Étrangères ? « Nous sommes fans de la gastronomie française. La moitié des cuisiniers du palmarès de l’édition précédente sont français, installés en France ou ayant été formés en France ou par un chef français ». Là tout est dit : il n’y aura aucun incident diplomatique pendant cette conférence presse ! Autre question : dans cette logique de transparence, pour quelles raisons la liste des 36 membres de chaque fédération régionale et le nombre de votes par restaurant ne sont-ils pas dévoilés ? « Cela ferait émerger du lobbying destiné à déstabiliser les décisions ». On enchaine : si les membres de l’académie du 50 Best s’engagent à voter pour des restaurants visités dans les 18 derniers mois, pourquoi ne pas aller plus loin et imposer une preuve de ladite escapade à travers une facture ou addition ? « C’est impossible. Comment savoir qui a payé ? Il n’y a pas forcément la mention du nom du votant. C’est un processus trop complexe. En revanche, nous les sensibilisons : chaque président de groupe régional signe une charte, même chose pour les votants qui, lors de la cooptation et au moment du vote, promettent d’attribuer leurs points en toute indépendance et véracité ». Là, il faut croire qu’il y a tant à dire que la réponse ne sera pas creusée par un autre journaliste. Pourquoi Andrea Petrini, président du groupe France et auteur de piges pour Alimentation Générale, Cook.Inc, le Fooding, Fool Magazine, Gazzetta Gastronomica, L’Express, Le Nouvel Observateur, Lucky Peach, l’Officiel Voyage, L’Optimum, GQ France et Slate.fr (rayez la mention inutile !) brille-t-il par son absence du jour ?…

par Ézéchiel Zerah

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Source Atabula.com